Retour de week-end à Lille-Flandres. Sur le quai les voyageurs traînent leurs valises chargées de souvenirs

Photo : Vincent Delbrouck – Texte : Matthieu Crocq

 

 

 

Lundi 1er mai, 21 h 59. Lent, puissant, le TGV tire son lourd fardeau d'un retour de week-end. Beaucoup de jeunes encore, vingt ans, vingt-cinq ans, souvent seuls. Quelques familles, des couples, un groupe de retraités. Tous rapportent à Lille un petit morceau de leur vie : un vélo, un djembé, un chat dans un panier d'osier, des rollers, un carton à dessin, une raquette de tennis. La barbe et le chapeau noir d'un rabbin. Un saxophone, une guitare, une veste de quart. Autant d'objets précieux, de passions, d'existences pressenties. Un brin de muguet, un téléphone portable qui joue Mozart, un bébé dans ses pyjamas blancs ornés de soucoupes volantes — et c'est fini.

Le quai est désert : la marée est passée. Le train s'ébroue, repart en sens inverse, pour Roubaix et Tourcoing. Un gros rat court sur le ballast, se faufile entre les traverses sales et les cailloux noircis.

Seule reste la fille au brin de muguet, qui attend.

 


– © Hors Les Murs – Mai 2000 –
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